LÉO TAXIL - « Les Amours Secrètes de Pie IX [Tome 3] » (1881)
- Dorian Brumerive
- 28 août
- 33 min de lecture
Dernière mise à jour : il y a 2 jours


Ce troisième tome, qui pourrait presque être le dernier – l'histoire se concluera prématurément durant les premières pages du tome 4 - , commence à laisser entrevoir les pressions extérieures que subit Léo Taxil suite aux livraisons hebdomadaires de son feuilleton.
En effet, il ne faut pas perdre de vue que si, de nos jours, la publication d'un roman comme « Les Amours Secrètes de Pie IX » provoquerait un scandale absolu, il était en 1881 absolument impubliable – et pourtant, il fut publié.
Initialement, c'était un journal d'Occitanie, dont Taxil était originaire, « Le Midi Républicain », qui en avait publié les premiers chapitres, mais très vite, l'opposition catholique en dénonça la publication, et commença à menacer le journal de poursuites et de manifestations devant ses locaux.
La publication du roman fut donc interrompue à l'amiable après quelques mois, et Léo Taxil décida de la continuer via sa « Librairie Anticléricale » à Paris. Le terme "roman-feuilleton" venait du fait qu'avant de sortir en volumes, ces romans étaient écrits – et souvent improvisés – dans un journal hebdomadaire. On découvrait donc chaque semaine, en lisant son journal, un ou deux nouveaux chapitres d'une histoire à suivre. Ces épisodes étaient alors appelés des "livraisons". Mais le succès était parfois si grand que certains auteurs très populaires, se désolidarisant d'un journal, publiaient leurs feuilletons en fascicules hebdomadaires auto-édités d'une trentaine de pages qui étaient distribués dans les kiosques, mais auxquels on pouvait aussi s'abonner pour les recevoir par la Poste, ou plutôt les P&T (Postes et Télégraphes) comme on les appelait en ce temps-là.
C'est donc à ce dernier système que recourut Léo Taxil pour poursuivre et achever la publication des « Amours Secrètes de Pie IX », ce qui d'ailleurs explique la liberté éditoriale et la totale absence de censure de ce roman. Même si Léo Taxil était encore à peu près inconnu comme feuilletoniste, le scandale autour du livre lui-même lui fit apparemment une bonne publicité qui lui valut un grand nombre d'abonnements.
Pour autant, Léo Taxil était constamment attaqué de toute part, son adresse à Paris fut révélée, adresse qui était en réalité le pied-à-terre de sa mère. Nous verrons plus en détail dans la critique du tome 4 les avanies et les menaces que Léo Taxil a subi, ainsi que les détails du procès qui lui a été intenté par le neveu même du défunt pape Pie IX.
Toujours est-il qu'au fur et à mesure que l'auteur écrivit les chapitres qui composent ce troisième tome, les pressions et les menaces que l'on exerçait contre lui devenaient de plus en plus oppressantes. Malgré la détermination de Léo Taxil à mener à bien son travail, bien des éléments et des incohérences de ce troisième tome reflètent la tension nerveuse de l'écrivain, ses moments d'inquiétude et de panique qui l'amènent progressivement à délayer ou à négliger cet interminable récit qui pouvait alors lui coûter sa carrière.
Nous retrouvons d'abord le comte et la comtesse de San Gaëtan, dont les agissements pervers et les intrigues suspectes ont fini par inquiéter les jésuites. Leur général en chef, Rothmann et le cardinal Rancolini, nouvellement introduit dans le Gèsu, décident de faire une descente dans la maison de Gioranni récupérée par le couple d'escrocs. Ils ont en effet récupéré ce qu'ils pensent être l'original d'un document interne au Vatican, rédigé et signé par Pie IX, recommandant l'organisation d'un attentat contre Napoléon III, jugé hostile à l'influence papale.
Ce document fut subtilisé par Léonore de San Gaëtan, qui le confia à son mari, lequel, doué d'extraordinaires talents de faussaire, en a rédigé des copies, qu'il a caché dans différents endroits d'Italie et de France.
Sous la direction de l'habile cardinal Rancolini, fort opportunément envoyé en France pour chercher Clélia, l'enquête sur le couple San Gaëtan a permis de découvrir que le comte et la comtesse sont en réalité un couple d'escrocs parfaitement roturiers, nommés Ridegang et Adèle Verrat. Rancolini est parvenu à mettre la main sur le document caché à Paris, et est revenu en urgence le rapporter au Vatican, laissant ses sbires se débrouiller pour retrouver Clélia.
C'est donc pour cette raison que les jésuites descendent en force pour arrêter les San Gaëtan, mais ceux-ci ne se laissent pas faire. Léonore parvient même à enfoncer dans le dos de Rothmann la pointe d'une bague empoisonnée que Pie IX lui a offert pour se défendre. Néanmoins, on parvient à arraisonner le couple, et à l'immobiliser. Blessé, mais ne soupçonnant pas qu'il a été empoisonné, Rothmann brandit lui-même le document de Paris, et reste ébahi quand San Gaëtan lui rit au nez. Le comte lui fait remarquer quelques minces détails qui prouvent que le document n'est qu'une copie. L'original est caché en lieu sûr, et ordre a été donné de le divulguer si le comte disparaît.
En réalité, l'original n'est pas si loin, il est dans les sous-vêtements de la comtesse, mais aucun jésuite n'ira y faire des fouilles. Même Pie IX, qui n'a plus l'ardeur des jeunes hommes à déshabiller leurs compagnes, n'a jamais eu l'idée de toucher les dentelles de Léonore, et ne soupçonne pas que son courrier compromettant s'y trouve.
Il n'empêche, pour la première fois, les Jésuites sont tenus en échec par un homme seul, capable de faire s'effondrer la papauté ou de provoquer une guerre européenne. Pour autant, San Gaëtan ne cache pas qu'il ne vise pas si loin, et que la possession de ce document n'a pas d'autre fonction à ses yeux que de servir d'assurance-vie.
Les âmes damnés du Gèsu sont donc bien obligés de rentrer au bercail. Mais à peine arrivé dans sa paroisse, Rothmann se sent nauséeux, et s'allonge. Cette maladie est bien étrange, et le docteur appelé en urgence identifie un empoisonnement sans remède. Bien que le médecin ne décèle pas l'origine de cet empoisonnement, Antonelli et Rancolini ne doutent point que les San Gaëtan en soient à l'origine. Néanmoins, ils ne pipent mot : la mort de Rothmann les arrange, celui-ci étant un peu plus vertueux qu'eux. Désormais, les Compagnons de Jésus sont entre les mains d'Antonelli et de Rancolini, lesquels se sachant mutuellement aussi redoutables l'un que l'autre, préfèrent se partager équitablement le pouvoir sans chercher à se nuire.
Néanmoins s'ils doivent leur bonne fortune aux San Gaëtan, l'impudence et l'arrogance de ce couple doit être punie. Aussi, confient-ils à l'ex-cardinal Nicolo Gioranni, ancien amant de Léonore, exilé de force par Pie IX à la demande de cette dernière, le soin de mener une enquête sur la prétendue comtesse, toujours favorite de Pie IX, afin de trouver une preuve concrète de sa vilenie et de convaincre le pape de la faire disparaître.
Les trois hommes se donnent beaucoup de mal pour pas grand chose : si le comte de San Gaëtan se félicite de la tournure des événements, Léonore, elle, est progressivement dévorée par la peur. Elle se doute que la mort de Rothmann va pousser les jésuites à quelque revanche perverse, et juge qu'il faudrait quitter le Vatican et changer d'identité avant qu'il ne soit trop tard. De plus, elle en a assez de devoir coucher avec Pie IX, et de subir ses fantasmes dégradants. Qui plus est, le pape est vieux, il pourrait mourir à n'importe quel moment, et le couple serait alors totalement à la merci de leurs ennemis.
Malheureusement, San Gaëtan ne l'entend pas de cette oreille. La place est trop bonne, l'argent y est facile, et il permet de tout acheter. Le comte menace ouvertement Léonore de la tuer si elle ne lui obéit pas, puis, honteux de sa maladresse, engage un jeune et beau garçon français, Pierre, comme garde-du-corps de Léonore, et aussi comme repos de la guerrière.
Néanmoins, cette délicate attention va causer sa perte, car Pierre est un jeune homme sans grande expérience des femmes, et qui est très vite hypnotisé par Léonore. Celle-ci lui cède, mais réalise que le garçon est éperdument amoureux. Aussi, décide-t-elle d'utiliser l'amour candide de Pierre pour le monter contre son mari, prétendant être battue, exploitée et forcée de se prostituer. Au fil des semaines, la tension entre les deux hommes devient palpable, aggravée par Léonore qui fait tout pour énerver son mari jusqu'à ce qu'il la batte. Finalement, Pierre et le comte finissent par en venir aux mains. Pierre étant plus jeune, plus athlétique et dopé par l'amour qu'il voue à Léonore, il étrangle le comte de ses mains nues en quelques minutes.
Léonore n'a pas attendu la fin de la lutte pour appeler les sbires du Vatican, lesquels surgissent et maîtrisent Pierre avant de l'enfermer dans un cachot. Dans son témoignage, Léonore charge Pierre au maximum, le présentant comme un fou dangereux qui a tué son mari par pure jalousie. En parallèle, elle rend visite à Pierre en secret dans sa prison, le supplie de ne rien dire sur la relation adultère qu'ils partageaient, et l'assure qu'elle œuvre en secret à sa délivrance. Lorsqu'il est condamné à être guillotiné par le tribunal du Vatican, Léonore rend visite à Pierre une dernière fois dans sa prison, et lui fait croire qu'elle a soudoyé le bourreau et que la guillotine sera truquée. Il lui suffira de rester immobile après que la lame soit tombée. Elle le rejoindra alors, et ils partiront ensemble loin de l'Italie pour vivre leur amour.
Bien évidemment, rien de tout ça n'est vrai. Pierre se rend à la guillotine serein et heureux, le cœur gonflé d'espoir, et sa tête roule dans le panier quelques minutes plus tard.
Débarrassée de son mari et de ce benêt qu'elle a instrumentalisé, Léonore de San Gaëtan se croit libre. Elle a bien tort. La mort du comte, au cours d'un fait divers sans ambiguïté, change beaucoup de choses, aux yeux de la Compagnie des Jésus. Gioranni récupère sa maison, et découvre quantité de documents prouvant le jeu ambigu et cruel de Léonore, ainsi que la preuve de la substitution de la lettre compromettante de Pie IX. Accompagné d'Antonelli, il dépose toutes ces preuves accablantes sur le bureau de Pie IX, qui en reste médusé. Sa passion pour Léonore était bien réelle, mais aucun homme n'aime apprendre à quel point il a été dupé et volé par la femme qu'il aime. Aussi donne-t-il son feu vert à Antonelli pour la faire disparaître, mais à condition que cela paraisse naturel, et que le clergé ne puisse y être impliqué.
Pour Antonelli, la solution est fort simple : il gardait dans une cellule des "Carcere Novi" l'ancien amant de Léonore, Alfred de Kervilly, réchappé de justesse d'une balle tirée par le comte de San Gaëtan, et soigné d'une tentative d'empoisonnement par Léonore elle-même. L'homme a survécu, mais il est resté à moitié fou, et les Jésuites n'ont eu aucun mal à modeler sa cervelle détruite en alimentant une haine meurtrière contre Léonore. Antonelli avait jugé, avec raison, qu'une telle machine à tuer pouvait avoir son utilité pour stopper la comtesse.
Alfred de Kervilly est ainsi relâché et placé, couteau en main, sur un chemin où le fiacre de Léonore est en train de s'engager. Leurs deux regards se croisent, et Léonore, persuadée qu'Alfred de Kervilly était mort, pousse un cri d'épouvante en le voyant. Alfred reconnaît alors son ancienne maîtresse : il court après le fiacre, le rattrape, monte à son bord et poignarde Léonore d'une dizaine de coups de couteau.
Un crime horrible, mais sans mystère apparent. On voit bien qu'Alfred de Kervilly est un fou. On l'envoie donc manu-militari à la guillotine. Un prêtre jésuite est néanmoins appelé pour assister les policiers qui ramènent le cadavre de la victime. En déshabillant le corps, on trouve le document secret volé à Pie IX, et dont le jésuite s'empare aussitôt. Les Compagnons de Jésus peuvent se féliciter, leur plan s'est déroulé parfaitement.
Hélas, revenu dans sa solitude, Pie IX déprime, et repense à sa Clélia que Rancolini devait lui ramener. Celui-ci repart donc pour la France, où il avait fini par apprendre que Clélia était hébergée par une certaine Mme Destival, une italienne mariée à un officier français. Rancolini l'ignore, mais il s'agit de Luizza, la fille du chef des "carbonari" de Spolète, que Pie IX avait fait enlever et avait engrossée. Libérée par son père et Paolo Serruzzi du couvent où elle était retenue, elle avait accouché dans la cachette des "carbonari", puis avait offert ce bébé dont elle ne voulait pas à des paysans de la région qui ne pouvaient pas avoir d'enfants. Après la mort de son père, Luizza était montée à Paris tenter sa chance, mais avait failli périr de faim et de froid dans la rue. Destival, un officier ivrogne l'avait ramassée dans la rue, dans une démarche charitable, et l'avait ramenée chez lui. Mais en la déshabillant et en découvrant un corps magnifique, Destival avait senti ses sens s'éveiller, et il l'avait alors violée pendant son sommeil. Néanmoins, une fois dégrisé, il s'était senti terriblement honteux de ce qu'il avait fait et n'osant pas renvoyer cette fille dans la misère avec l'enfant qu'il venait probablement de lui faire, il décida de l'épouser et de lui donner une situation.
Presque vingt ans plus tard, Mme Destival ne pouvait que se féliciter de sa mésaventure. Elle n'était guère amoureuse de son mari, mais celui-ci ne demandait pas tant, et elle lui gardait une reconnaissance éternelle du statut de haute bourgeoise parisienne qu'il lui avait donné. Qui plus est, le viol qu'elle avait subi, et qui effectivement se montra fécond, lui donna un fils adorable, Raoul, un peu exalté, mais qu'elle aimait tendrement.
Luizza resta en contact, avec les "carbonari" de son Italie natale, avec l'accord de son mari, plutôt anticlérical, et accueillit donc avec empressement la jeune fille qu'ils lui envoyèrent, sans soupçonner évidemment un seul instant qu'il s'agissait de la fille qu'elle avait eu avec Pie IX. Elle sent bien une certaine tendresse pour cette jeune fille, qui lui ressemble un peu, mais elle ne peut imaginer que cette jeune italienne est son enfant.
Clélia s'installe donc dans la famille Destival, mais elle ne tarde pas à obséder le jeune Raoul, qui en tombe éperdument amoureux – sans savoir bien sûr que Clélia est sa demi-sœur.
Lorsqu'il s'en ouvre à sa mère, caressant l'espoir qu'elle arrange un mariage, Mme Destival lui oppose un refus catégorique : Clélia est fiancée à un "carbonari", un certain Carlo, qui sera bientôt à Paris avec son ami Paolo Serruzzi. Ils voyagent sous une fausse identité depuis l'Italie, et se dirigent vers la France. Sans soupçonner le chagrin et la colère qui ravagent le cœur de Raoul, elle donne quelques détails sur la date et le lieu de leur arrivée. Persuadé que Clélia tombera amoureuse de lui si Carlo disparaît, Raoul dénonce tout ce qu'il sait sur les deux "carbonari" au curé confesseur de sa mère, lequel s'empresse d'envoyer un télégramme au cardinal Rancolini. Ce dernier soupçonne que cette délation inattendue repose sur un fond de rivalité amoureuse, et que le jeune Raoul Destival sait où se trouve Clélia.
Rancolini décide donc de porter le drame dans la famille Destival en s'assurant la complicité d'un jeune fils de ministre : celui-ci, lors d'une réception, offense volontairement Raoul, lequel provoque l'insulteur en duel, sans savoir que ce jeune fat est extrêmement habile à l'épée.
Raoul est très grièvement blessé, et ramené inconscient chez les Destival. Sa mère est profondément choquée, et comme si son instinct l'avertissait que Clélia est à la base de ce drame, elle se met à ressentir une aversion totale pour la jeune fille, qui finit par tourner à la haine pure.
Clélia ne parle pas français, et personne chez les Destival ne parle italien. La jeune fille sent bien que sa protectrice l'évite et lui voue une rancune, mais elle n'en comprend pas la raison.
Finalement, Raoul ayant besoin de soins constants, les Destival décident de transférer Clélia chez des amis à eux, et plus précisément chez une femme qui possède un atelier de couture.
Au XIXème siècle, les jeunes filles issues d'un milieu modeste et n'ayant pas les moyens de faire des études avaient souvent comme recours d'exercer le métier de couturière, reprisant et réparant des vêtements usés ou déchirés que d'autres pauvres gens leur apportaient. Cette tâche occupait toutes leurs journées, et leur faisait gagner un salaire très modeste, mais qui leur permettait de payer leur loyer et leur nourriture.
Les plus douées travaillaient en indépendantes, les autres entraient dans un atelier de couture au service d'une patronne. Elles gagnaient un peu moins d'argent, mais elles étaient assurées d'avoir toujours du travail, et de ne pas non plus se retrouver seules toute la journée.
Mme Destival fréquente assidûment, plus par avarice que par besoin, un atelier de couture tenue par une femme autoritaire et d'une grande laideur que tout le monde appelle La Gerbrod. Sur le moment, l'idée de confier Clélia à La Gerbrod semble bonne : la cheffe d'atelier n'a pas de fils qui serait susceptible de s'amouracher de Clélia, elle règne sur un cheptel exclusivement féminin, et ce serait aussi pour Clélia l'occasion d'apprendre le français et de s'occuper en travaillant.
La Gerbrod est dans un premier temps enthousiaste. Comme elle doit héberger Clélia, ses frais d'entretien seront directement prélevés sur son salaire, et on s'arrangera pour lui en laisser le moins possible. Mais ce que les Destival ignorent, c'est qu'en dépit de son physique repoussant, La Gerbrod n'est pas célibataire. Elle vit avec un individu louche prénommé Max, ancien souteneur, cambrioleur occasionnel, mais surtout joueur impénitent, capable de perdre des sommes astronomiques sur des tapis verts, et qui n'est en couple avec La Gerbrod que parce qu'elle lui sert de banque au crédit illimité, et le cas échéant, de cachette. Seules les employées de La Gerbrod connaissent son existence, et d'ailleurs certaines s'offrent volontiers en secret à ce beau voyou, toujours courtois avec les jeunes filles.
Connaissant donc les mœurs volages de son amant, mais étant totalement dépendante de lui sentimentalement et physiquement, La Gerbrod tombe ponctuellement dans de violentes crises de jalousie auxquelles Max ne peut mettre fin qu'en battant violemment sa compagne, et l'arrivée de Clélia va tripler, quadrupler, ces crises de jalousies et le degré de toxicité de la relation entre Max et La Gerbrod.
Comme de juste, Max a remarqué immédiatement la jeune italienne, mais le chagrin et la détresse de cette jeune fille lui inspirent un certain respect et une considération paternelle sur lesquels La Gerbrod se méprend gravement. Elle pense que Max est en train de tomber amoureux de Clélia, et elle lui fait des scènes tous les soirs, scènes qu'elle impose aussi à Clélia, en l’abreuvant d'insultes, car elle la prend pour une allumeuse qui essaye de jouer les mijaurées, car elle est viscéralement jalouse de sa beauté et de sa jeunesse.
Comme Clélia ne comprend rien à la colère de sa nouvelle logeuse, cette dernière finit par la battre, la griffer et même tenter un jour de la poignarder. Clélia ne doit la vie sauve qu'à un réflexe de Max qui parvient à désarmer la Gerbrod, et aux vaillantes petites employées couturières qui s'interposent entre Clélia et La Gerbrod.
Hélas, Max n'est pas là tous les soirs, le démon du jeu l'enlève parfois à La Gerbrod durant des nuits entières. Celle-ci fomente donc un plan pour se débarrasser de Clélia avec l'aide de sa servante. Celle-ci propose à Clélia de venir avec elle en calèche faire une course, puis, alors que la nuit tombe, elle la fait descendre dans une rue assez éloignée, avant de repartir à toute vitesse, abandonnant Clélia derrière elle.
Se retrouvant seule, abandonnée en pleine nuit, dans la capitale d'un pays dont elle ne parle pas la langue et où elle ne sait pas se repérer, Clélia se retrouve d'abord en état de choc, et deux fêtards un peu ivres passant par là, prenant la jeune fille pour une tapineuse qui attend le client, commencent à l'aborder et à la tripoter. La jeune fille n'a d'autre ressource que de hurler, ce qui ramène des sergents de ville qui embarquent tout le monde.
C'est pour Clélia le début d'une terrible épreuve : enfermée en prison avec des détenues qui la battent, et lui arrachent ses riches vêtements, elle est gardée enfermée durant des semaines dans la prison spéciale pour prostituées récalcitrantes au dépôt de Saint-Lazare. Un matin, deux infirmiers viennent se saisir d'elle, et l'amènent dans un cabinet médical. Là, elle est mise nue, allongée de force sur une table, tandis qu'un médecin introduit un spéculum dans son vagin pour vérifier que la jeune femme n'est pas atteinte d'une maladie vénérienne. Son monocle manque de tomber quand il réalise que Clélia est encore vierge.
Il faut bien se résoudre à accepter le fait qu'il y a eu erreur sur la personne, et que cette jeune femme étrangère a été prise pour celle qu'elle n'était pas. Hélas, pour Clélia, il est trop tard : ces épreuves ont été psychologiquement trop dures pour elle. Elle a désormais perdu définitivement la raison, et sombre dans un mutisme autiste dont elle s'échappe parfois dans des crises de fureur animale.
On choisit alors de l'expédier dans un couvent de la région parisienne spécialisé dans l'internement des folles furieuses dont on ignore l'identité, mais hélas, rien n'exacerbe plus la rage et la haine démente de Clélia que de se retrouver à nouveau détenue dans un établissement religieux, entourée de bonnes soeurs qui, naïvement, tentent de la calmer en la contraignant à des pratiques religieuses.
Mais même pour ces dévouées soeurs, Clélia est une malade éprouvante, violente et même effrayante. La mère supérieure finit par ordonner que l'on profite d'une promenade de la jeune fille dans la cour arrière du couvent pour laisser ouvert un portail, afin qu'elle s'échappe et qu'elle aille mourir ailleurs.
Alors que Clélia, désormais apaisée mais toujours folle, se retrouve sur les routes boueuses franciliennes, sans argent, sans nourriture, sans personne pour l'aider, et avec de bien faibles perspectives de survivre encore longtemps, elle est miraculeusement recueillie par Séverine de Rancueil, une jeune aristocrate qui passait en fiacre sur la route. Mme de Rancueil est une femme douce et amicale, qui a l'habitude de sauver ainsi des jeunes filles en détresse, et parvient à gagner la confiance de Clélia.
Séverine de Rancueil vit dans une maison cossue parisienne, dans le quartier de la Chaussée d'Antin, une propriété qui appartient à son oncle, Paterne de Rancueil. Ayant perdu ses parents très jeune, Séverine fut élevée par ce dernier, qui la viola dès l'âge de 9 ans. Devenue adulte, elle sut repousser les assauts de son oncle, mais son innocence perdue fit d'elle un monstre aimable de cruauté et de froideur. Elle transforma la maison familiale en un gigantesque lupanar pour vieillards lubriques, prenant un plaisir pervers à recueillir des jeunes filles innocentes et à les corrompre.
Si elle a recueilli Clélia, qui est certes folle mais joliment faite, c'est avec l'espoir de l'amollir en la traitant avec douceur et générosité, afin d'en faire une prostituée passive et enfantine (on ne disait pas encore "lolita", mais ce fantasme existait déjà), quitte à la bourrer d'opium pour la pousser à la docilité. Séverine de Rancueil n'a en effet pas pu se rendre compte du caractère violent de Clélia, et n'aura d'ailleurs pas l'occasion de le découvrir. Nourrie et dorlotée, traitée comme une princesse, la jeune fille qui a perdue l'habitude de parler, sinon pour dire son prénom, puisque personne ne comprend son langage, s'attendrit effectivement dans cette nouvelle famille qui lui fait oublier celle qu'elle a perdu en Italie.
Séverine a en effet pressenti la virginité de Clélia, et afin de la former aux plaisirs charnels auxquels elle est désormais vouée, elle l'a confié à son oncle lubrique. Mais malgré son lourd passé pédophile, M. de Rancueil se sent étrangement ému par Clélia, chez laquelle il sent une souffrance intérieure qui le bouleverse. Il ne tarde pas à tomber amoureux de la jeune italienne, mais d'un amour pur, virginal, presque adolescent. Quant à Clélia, elle ressent pour ce vieil homme, qui n'ose pas se permettre avec elle ce qu'il s'est permis avec tant d'autres, un amour véritable, désincarné, sublimé par la quête d'un père visant à remplacer celui qui a été assassiné au Vatican.
Un matin, les deux tourtereaux névrosés s'enfuient ensemble, non sans vider la caisse du bordel de luxe pour subvenir à leur existence future. Séverine de Rancueil est furieuse de cette aventure, et ne manque pas de le faire savoir à sa clientèle. Or, bien entendu, parmi cette clientèle pervertie, il y a des ecclésiastiques, et l'un d'eux cille quand il entend le nom de la fuyarde. Ce prêtre lubrique est un proche de Rancolini. Il a entendu parler de Clélia.
Il ne faut pas longtemps à Rancolini, une fois informé que Clélia est en fuite avec un certain M. de Rancueil, pour lancer ses hommes de main à la poursuite des deux fuyards, qu'ils ne tarderont guère à rattraper.
Il s'en fallut de peu que Clélia échappât aux mains des sbires du Vatican. Elle n'avait pas disparu depuis une semaine que Paolo Serruzzi parvenait enfin à Paris, après avoir laissé derrière lui, blessé dans une attaque de brigands, son ami Carlo, le fiancé de Clélia.
Arrivé dans la capitale, il rejoint des contacts parisiens indiqués par ses amis italiens "carbonari", et découvre stupéfaits que ceux-ci sont des membres du mouvement extrémiste « Jeune Italie », et qu'ils se sont associés à des opposants républicains du Second Empire. Serruzzi est introduit dans une conspiration collective qui prépare un attentat contre Napoléon III par le biais d'une "machine infernale", c'est-à-dire d'une bombe à retardement artisanale.
J'ouvre une parenthèse dans ce résumé pour préciser que cet épisode est inspiré de faits réels : le mouvement « Jeune Italie » (« Giovina Italia ») fut créé en 1833 par Giuseppe Mazzini, ancien "carbonari" rêvant d'une forme de terrorisme républicain visant à s'attaquer aux États Pontificaux, mais aussi à la Maison de Savoie, dynastie royale italienne qui cherchait à monter sur le trône d'Italie, après en avoir été écartée pendant plus d'une décennie.
Le mouvement originel de Mazzini fut dissous en 1848, après plusieurs douloureux échecs, mais néanmoins le nom de son mouvement fut utilisé par différents activistes et militants opportunistes pendant environ une quinzaine d'années. Depuis 1954,« Giovina Italia » est un nom régulièrement repris par des mouvements d'extrême-droite, afin d'effacer le souvenir de Mazzini.
Le 14 janvier 1858, l'un des membres de « Jeune Italie », un certain Felice Orsini, organisa un attentat contre le carosse de Napoléon III, ami proche de la Maison de Savoie, alors qu'il passait rue Le Peletier pour se rendre à l'Opéra, qui se trouvait à cette époque face au n°19 de cette rue particulièrement étroite. Trois bombes sont jetées sur le carrosse et la garde de Napoléon III, atteignant aussi beaucoup de badauds qui étaient présents pour assister à l'arrivée de l'Empereur.
L'attentat fit 12 morts et 134 blessés plus ou moins graves. Protégé par son carrosse en acier trempé, Napoléon III et son épouse Eugénie s'en tirent sans une égratignure. Les terroristes sont arrêtés et guillotinés deux mois plus tard.
Anecdote peu connue : c'est cet attentat qui amena Napoléon III à fermer cet opéra fort dangereux d'accès, puisqu'il se trouvait dans une rue minuscule, pour en faire construire un autre, quelques rues plus loin, au beau milieu d'une place dégagée : ce sera l'Opéra Garnier que, cependant, Napoléon III, ne visitera jamais puisque l'édifice sera finalement inauguré en 1875, cinq ans après la chute du Second Empire et deux ans après la mort de l'Empereur en exil.
Léo Taxil ici s'inspire directement de l'attentat d'Orsini dans son roman, mais avec des variantes, d'autant plus que l'action est censée ici se passer durant les années 1860.
Les conspirationnistes envisagent de faire sauter l'immeuble même où ils se réunissent, le lendemain matin, au moment où le carrosse de Napoléon III passera devant. Il ne s'agira pas d'utiliser des bombes manuelles, mais une quantité phénoménale d'explosifs liés à un système mécanique de retardement. Et cette "machine infernale" restera dans la cave de l'immeuble, le fera exploser, et l'édifice s'écroulera sur Napoléon III et sa suite.
Serruzzi est profondément choquée par cette idée, et l'exprime bien haut. La mort de Napoléon III lui importe peu, mais le succès de cette entreprise nécessite le plus grand secret, et implique donc que les habitants de l'immeuble où ils se trouvent, des familles entières et de condition modeste, soient broyés dans l'explosion. Et non seulement les gens de cet immeuble, mais très probablement ceux de l'immeuble d'en face, et des immeubles voisins, tant la quantité d'explosifs a de quoi faire voler un pâté de maisons entier.
Pour les conspirateurs, fanatiques et déterminés, c'est là un sacrifice inévitable et nécessaire. Serruzzi alors les harangue longuement sur la nécessité de ne pas souiller une juste cause par un acte barbare qui en dénature à la fois la pureté idéologique et la dignité humaine, particulièrement de la part de ceux qui prétendent défendre le peuple, et qui devraient se sentir horrifiés à l'idée de le sacrifier.
Par la bouche de Serruzzi, c'est Léo Taxil qui parle - peut-être sous l'influence de son frère Maurice Jogand, grand humaniste socialiste qui n'adhérait pas à l'anarchisme, et qui a probablement rédigé ou imaginé certains passages très politiques de ce roman. Toujours est-il que Léo Taxil, qui se revendiquait anarchiste, signe quelques pages vibrante contre le terrorisme et l'action criminelle fanatique, des pages qui résonnent encore très intensément en ce début de XXIème siècle.
Serruzzi convainc le lecteur, mais nullement ses interlocuteurs, qui ne voient en l'italien nouvellement arrivé qu'une menace potentielle pour une action lentement mûrie et préparée. Serruzzi en sait trop, et pourrait trahir. Les conspirateurs lui sautent dessus, et l'exécuteraient dans la minute, si certains ne s'y opposaient, prétextant, non sans raison, qu'un tel meurtre justifierait cette accusation de barbarie que Serruzi venait de proférer.
On décide finalement de baillonner et d'enchaîner solidement le récalcitrant, puis de l'abandonner tel quel dans la cave, à côté de la bombe. Ainsi, quand elle explosera le lendemain matin, Serruzzi sera la première victime collatérale de cet attentat, et personne ne pourra être responsable de sa mort. Satisfaits d'apaiser ainsi leur conscience, l'ensemble des conspirateurs quitte alors la cave, et va se cacher dans un autre lieu secret, en attendant le lendemain.
Durant une partie de la nuit, Paolo Serruzi tente en vain de se défaire de son baillon et des chaînes qui l'immobilisent, mais ses efforts sont vains. Il commence à se résigner à mourir, quand soudain, une dizaine d'hommes fait irruption dans la cave. Ce sont quelques uns des conspirateurs français qui n'ont pu trouver le sommeil, et qui ont réfléchi au discours de Serruzzi, avant d'arriver à la conclusion que l'Italien avait raison, et qu'ils allaient commettre un acte monstrueux. Secrètement, ils se sont échappés de leurs cachettes, se sont croisés sur le chemin qui menait à la cave, et se sont mutuellement reconus et encouragés.
Ils délivrent Paolo Serruzzi de ses chaînes, et lui confient le commandement de leur troupe improvisée. Serruzzi les remercie chaleureusement, puis il examine le mécanisme d'horlogerie de la bombe. Mais ni lui, ni ceux qui l'ont rejoint, ne savent comment arrêter ce mécanisme, ni même s'il y a un moyen de l'arrêter.
Serruzzi, explorant la cave, découvre qu'il y a une communication avec un égout qui semble descendre dans les profondeurs de la ville, entraînant un flux intense d'eaux sales.
Il décide alors que tous les hommes présents vont retrousser leurs manches, soulever ensemble délicatement la bombe et l'emmener pas à pas jusqu'à ce canal pour l'y faire basculer. La bombe est lourde, mais le débit est fort. Au pire, il entraînera la bombe jusqu'à une zone si profonde que son explosion ne détruira pas d'immeubles en surface; au mieux, elle sera traînée jusque au fond de la Seine, où elle explosera sans faire de dégats.
Les hommes parviennent à réussir leur tâche en seulement quelques heures. La bombe bascule dans les flots, où elle est draînée jusqu'à une zone assez profonde.
Le lendemain matin, quand elle explose, les immeubles en surface sont à peine ébranlés, mais la déflagration entraîne un véritable tsunami dans toutes les canalisations du quartier. Or, les conspirateurs, qui prévoyaient que la mort de l'Empereur entraînerait un déploiement de l'armée impériale dans la capitale à la recherche des coupables, s'étaient cachés dans des zones à sec au fin fond des égouts de Paris, avec des vivres pour plusieurs jours. Ils sont presque tous balayés et noyés par les flots d'eaux usées déplacés par l'explosion.
Paolo Serruzzi apprend avec consternation les conséquences de son geste. Désormais recherché par les hommes de Rancolini, mais aussi par les survivants de « Jeune Italie », et peut-être aussi par la garde impériale qui le soupçonne d'en faire partie, il comprend qu'il ne peut plus rester à Paris pour y chercher Clélia. La mort dans l'âme, il se déguise en vagabond, et quitte Paris pour retourner à Rome...
Durant tout ce temps, Pie IX se sent bien seul. La disparition de Clélia l'avait rendu déjà mélancolique. La mort de Léonore de San Gaëtan, qui occupait tant de place dans sa vie sentimentale, le fait plonger plus avant dans la dépression, et le contraint à une abstinence sexuelle qui le tourmente et multiplie ses crises d'épilepsie.
Le cardinal Antonelli s'en émeut. Il se sait lui-même le véritable chef du Vatican, mais en tant que Jésuite, il a besoin du pape comme pantin pour dissimuler ses véritables activités. La libido de Pie IX entraîne en effet bien des soucis, mais au moins, ils sont faciles à satisfaire, et ce pape-ci ne demande pas mieux qu'on le décharge des devoirs de sa fonction. Celui que l'on élirait à sa place ne se laisserait peut-être pas aussi facilement manipuler.
Tout l'intérêt d'Antonelli est donc que Pie IX vive le plus longtemps possible. Pour cela, il lui faut des jeunes filles, et surtout, il lui en faut plusieurs, afin qu'il ne se retrouve plus dans une détresse solitaire. Et surtout, il faut des jeunes filles consentantes, ou tout du moins dociles. Antonelli va donc convier à son assistant, le cardinal Valecchio, la mission de partir à la recherche de quelques jeunes filles un peu délurées mais qui n'en ont pas trop l'air, car Pie IX aime beaucoup l'innocence.
Les orphelinats, les pensionnats et les maisons closes sont soigneusement fouillées. Des bonnes soeurs "tentatrices" sont aussi envoyées dans les rues de Rome, à la recherche de petites employées ou de petites ouvrières aux rêves dorés. Deux jeunes filles, en particulier, sont repérées, observées, et finalement ramenées au Vatican. Pourtant, ce double choix qui semble mûrement réfléchi va se révéler en réalité désastreux.
D'abord, on repère une très jolie jeune fille qui semble timide, l'archétype de la jeune vierge italienne, une prénommée Berta, que l'on enlève sans ménagement dans une rue de la Cité Vaticane. Enfermée dans un couvent dévoué à la formation secrète des futures amantes de Pie IX, Berta se révèle étonnamment résistante. Sa docilité mélancolique cache en réalité une volonté de fer qu'aucune punition, aucune humiliation, aucune menace ne parvient à briser. Qui plus est, Berta est moins innocente qu'elle en a l'air : elle a un fiancé, Luigi, un jeune homme fort amoureux, et plein de ressources, qui va se mettre rapidement à la recherche de la disparue.
Ensuite,on déniche une seconde jeune fille, au prénom fort antique, Pulchéria, laquelle va se révéler un personnage majeur de ce troisième tome. Pulchéria est loin d'être aussi innocente que Berta. Elle est officiellement la fille d'un modeste antiquaire, mais en réalité - et cela, le Vatican l'ignore -, celui-ci n'est que son tuteur. Pulchéria est la fille d'un redoutable bandit, recherché par toutes les polices d'Italie et du Vatican : Castracani.
Pour plus de sécurité, ce brigand des grands chemins a laissé sa fille chez cet antiquaire à sa solde, qui avait déjà sauvé la petite fille d'une première tentative d'assassinat. Alors en odeur de fortune, il avait couvert ponctuellement sa progéniture de cadeaux et de bijoux, mais depuis le vol sacrilège des reliques d'un Saint, il était devenu un homme à capturer mort ou vif, et cette menace permanente l'obligeait à se tenir loin de sa fille. Hélas pour lui, cette mésaventure parvenait au moment où, devenant adolescente et sentant naître en elle de la coquetterie et des envies de luxe, Pulchéria s'agaçait que la manne paternelle ne dépose plus autant de richesses sur elle.
Les espions du Vatican n'ont guère besoin de l'enlever : ils savent fort bien que Pulchéria a l'âme d'une courtisane, et qu'il suffit simplement de lui proposer de devenir la maîtresse d'un puissant prélat en échange de richesses illimitées. Les yeux brillants de cupidité, Pulchéria accepte d'être conduite au palais papal, et abandonne son tuteur sans même lui laisser un mot.
Une fois installée en la luxueuse chambre qu'on lui a allouée à côté des appartements privés de Pie IX, Pulchéria apprend de la bouche de ses servantes que c'est du Saint-Père lui-même qu'elle devra être la maîtresse secrète et exclusive. Loin d'en être choquée, Pulchéria exulte. Le vieillard est répugnant, mais c'est l'homme le plus riche et le plus puissant d'Italie. Elle est certaine de lui extorquer des millions, et entend bien exercer sur Pie IX une domination totale.
Aussi quand Pie IX entre dans la chambre de Pulchéria pour ravir la virginité de sa nouvelle maîtresse, il n'imagine pas un seul instant quel dangereux serpent il a fait entrer au Vatican.
En effet, Pulchéria ne tarde pas à s'imposer, par la force et par les sens, dans ce palais du Vatican dont elle entend bien devenir la souveraine absolue. Plus encore que la défunte Léonore de San Gaëtan, Pulchéria exerce une emprise totale sur le faible Pie IX, se rebelle contre tous les évèques qui tentent de s'interposer, plus encore contre les bonnes soeurs chargées d'être à la fois ses servantes et ses geôlières. La jeune fille révèle un caractère de dragon qui balaye tout sur son passage, et impose son autorité par la terreur.
Antonelli se rend tardivement compte que l'exubérante Pulchéria est un véritable ouragan qui met en péril la discrétion même autour des amours secrètes de Pie IX. Hélas, le pape n'est déjà plus qu'un pantin fébrile entre les mains de la redoutable Pulchéria. Il n'est déjà plus possible de lui suggérer d'éloigner son envahissante maîtresse ou de la faire disparaître.
Le chef des Jésuites se souvient alors que l'on peut, avec de l'adresse, obtenir absolument n'importe quoi de Pie IX, sauf une chose : sa fidélité. Il repense alors à cette Berta, dont l'indocilité et la résistance pourrait détourner le pape de l'emprise de Pulchéria. Si Pie IX est faible face aux femmes de caractère, il est rapidement obsédé par une vierge pure qui défend sa vertu à tout prix. Sa passion inextinguible pour Clélia en témoigne suffisamment.
Antonelli envoie donc Valecchio chercher Berta au couvent où elle est retenue prisonnière, afin de la ramener d'urgence au Vatican. Quoique discret, ce transfert a pour témoin privilégie Luigi, le fiancé de Berta, qui se met à suivre en courant le fiacre ramenant la jeune Berta éplorée au palais du Vatican, avant de la faire entrer par une petite porte discrète. Une fois la jeune fille entraînée à l'intérieur, Luigi examine la porte et les fenêtres, à la recherche du moyen de pénétrer dans l'édifice. Il aperçoit alors non loin un homme puissant au regard courroucé, occupé aux mêmes observations : il s'agit du bandit Castracani, qui a remonté lui aussi la piste de sa fille disparue. C'est un homme cruel et déterminé, bien décidé à tuer de ses mains celui aui aura ravi la virginité de sa Pulchéria adorée. Sentant d'instinct que la même colère les anime, Castracani et Luigi sympathisent, et décident de s'associer pour tirer Berta et Pulchéria des griffes des prélats.
Comme prévu, l'arrivée de Berta au palais hypnotise le pape, qui échappe un temps à l'emprise de Pulchéria, bien décidé à ravir le pucelage de cette Berta par une lente et perverse persuasion. Mais Pulchéria, en dépit de son jeune âge, n'est pas prête à accepter une rivale, non qu'elle éprouve la moindre jalousie envers Pie IX, mais il est hors de question pour elle qu'une autre lui dispute son pouvoir sur ce vieux libidineux.
Le soir même, elle tente d'assassiner Berta, et il s'en faut de peu qu'elle ne réussisse. Mais cet acte manqué lui permet néanmoins de comprendre que Berta est loin d'envier sa position, et qu'il faut détourner autrement l'attention de Pie IX, d'autant plus que cette tentative de meurtre vaut à Pulchéria d'encore plus nombreux ennemis.
Pulchéria, déjà fort enrichie par la générosité de Pie IX, va donc se faire salonnière et organisatrice d'orgies. Elle fait recruter à grand frais les plus jolies prostituées d'Italie, les contraignant à un secret absolu, et les fait venir au Vatican déguisées en religieuses. Raffinement supplémentaire, avant de les offrir à Pie IX et aux nombreux autres invités, elle leur fait danser, sur des rythmes païens interprétés par des musiciens, des danses lascives et suggestives en gardant leur tenues de bonnes soeurs, qu'elles effeuillent petit à petit, à mesure que la tension érotique monte.
Afin de limiter les complots, Pulchéria invite à ses bacchanales hebdomadaires tous les grands évèques du Vatican, y compris ceux qui lui sont hostiles, y compris même le redoutable Antonelli.
Ainsi, non seulement Pulchéria parvient à reconquérir Pie IX, en devenant sa pourvoyeuse de chair fraîche, mais en partageant ses soirées perverses avec tous ceux qui souhaitent y venir, elle se rend indispensable à ceux qui souhaitaient son éviction. Même le cardinal Antonelli ne peut dissimuler son admiration grandissante pour cette manipulatrice exceptionnelle, aussi habile et tortueuse qu'un jésuite, et ça n'est pas peu dire. Pourtant, le règne si prometteur de Pulchéria sera de courte durée. Lors d'une de ces orgies, un commando d'une vingtaine d'hommes armés fait irruption dans les cuisines du Vatican. Il s'agit de Castracani et de se bande, accompagné de Luigi, qui s'aventure rapidement seul de son côté à la recherche de Berta pour la délivrer.
Ce commando est fort bien renseigné, car parmi les serveurs et les cuisiniers, il se trouvait un vieux compagnon de Castracani, ex-brigand repenti, qui est resté suffisamment impressionné par son ancien chef pour lui donner tous les renseignements nécessaires pour retrouver les deux jeunes filles.
La bande de Castracani se taille un chemin bruyant et sanglant dans les escaliers du Vatican, à la recherche du salon où l'orgie se déroule. Leur vacarme attire de nombreux zouaves qui sont proprement taillés en pièce. De son côté, épée en mains, Luigi a le champ libre pour gagner la chambre de Berta, gardée seulement par deux religieuses qu'il n'a aucun mal à assommer à coups de pommeau. Il s'enfuit avec Berta, et parvient à sortir du Palais sans être aperçu.
Pendant ce temps, Castracani déboule dans le salon des orgies, à la fois furieux et médusé par la perversion décadente qu'il aperçoit autour de lui, et estomaqué de surprendre sa fille, vêtue en princesse, amoureusement lovée sur les genoux de Pie IX.
Certes, Castracani supposait bien que Pulchéria avait été enlevée pour servir d'esclave sexuelle à un évèque ou un cardinal... Mais qu'elle soit la maîtresse du pape, c'est ignoble ! Et une maîtresse qui ne semble nullement gênée, qui plus est ! Castracani se sent empli de fureur et de dégout, mais néanmoins interpelle sa fille pour lui dire qu'il est venue la délivrer, et qu'elle doit le suivre pour qu'il la conduise en lieu sûr.
Tous les prélats présents dans cette orgie, la plupart avec des prostituées plus ou moins dévêtues sur les genoux, étaient restés médusés par l'entrée des hommes armés. Ils le sont encore plus en apprenant que Pulchéria n'est autre que la fille de Castracani, le bandit le plus recherché d'Italie !
Face à ce torrent d'émotions violentes et contrastées, Pie IX réagit à la manière habituelle, c'est-à-dire qu'il est brusquement saisi d'une violente crise d'épilepsie et s'effondre à terre, pris de tremblements, et bavant une mousse blanchâtre.
Furieuse à son tour, Pulchéria répond à son père que pour rien au monde elle ne le suivra avec ses voyous crasseux, et lui ordonne de partir et de la laisser en paix, car elle est parfaitement heureuse là où elle se trouve.
Antonelli est le premier à reprendre ses esprits, et harangue brutalement Castracani d'un ton impérieux, l'accusant de sacrilège, d'impiété, de crime contre la religion, et de damnation éternelle, ce qui, au milieu d'une bacchanale emplie de femmes à demi-nues, ne manque pas de sel.
Castracani ne s'en laisse pas conter, et réitère son ordre à Pulchéria, l'enjoignant à le suivre. Pulchéria refuse avec encore plus de forces, répondant que seul Pie IX est habilité à lui donner des ordres. Castracani se souvient alors qu'il avait promis d'occire celui qui avait volé la virginité de sa fille, et d'un air farouche et déterminé, il s'avance, sabre au clair, vers le corps tremblotant du pape pour lui donner le coup de grâce.
Rien ne semble pouvoir arrêter le colosse, puisque aucun des prélats n'est armé.
Mais contre toute attente, ce crime terrible n'aura pas lieu. Castracani est soudainement désarmé et maîtrisé par ceux-là même dont il ne se méfiait pas : ses propres hommes, placés derrière lui.
Car en Italie, on a beau être un brigand, un voleur et un assassin, on n'en garde pas moins un fond de religion profond ancré dans l'esprit. Le sermon menaçant du cardinal Antonelli avait laissé Castracani de glace, mais avait fait son petit effet sur ses comparses. La peur panique d'une damnation éternelle, consécutive à l'assassinat sacrilège d'un pape, les a poussés à se saisir de leur chef, pour le salut de son âme, et à se retirer du palais du Vatican en emmenant avec eux un Castracani enragé mais réduit à l'impuissance.
Resté seul maître à bord dans ce salon orgiaque, avec à ses pieds le pape épileptique toujours agité de spasmes, le cardinal Antonelli déguste sa victoire et comprend la nécessité de profiter de l'indisponibilité actuelle de Pie IX pour remettre de l'ordre dans ce palais. Rassemblant les zouaves encore vivants, il leur donne comme premier ordre d'arrêter Pulchéria et de la mettre en cellule. Puis il fait porter le pape dans sa chambre afin qu'on lui administre ses médicaments, et fait évacuer les cadavres des zouaves. Parmi eux, il reconnaît celui de son conseiller Valecchio, qui a sans doute voulu empêcher les brigands de rentrer, et l'a payé de sa vie. On ne pourra plus lui reprocher d'avoir ramené Pulchéria... Enfin, Antonelli s'isole de son bureau et signe un ordre de transfert, pour que l'on envoie Pulchéria dans un couvent particulièrement sévère de la côte est de l'Italie, où elle passera le restant de ses jours à méditer sur la vanité du pouvoir.
Antonelli ne nourrit aucune rancune personnelle contre Pulchéria, mais puisqu'elle est la fille de Castracani, il est évident qu'elle ne peut rester au Vatican, où son père finira tôt ou tard par revenir la chercher. Il faut donc qu'elle finisse sa vie à racheter ses pêchés dans un couvent et que cela se sache publiquement, afin que son père accepte la sagesse de ce renoncement au monde, et ne soit plus tenté de se venger sur Pie IX.
Jouant la comédie de la résignation, Pulchéria feint de se soumettre à la décision du cardinal Antonelli, mais sur la fin de son voyage, elle parvient à échapper à la surveillance de ses geôliers et s'enfuit en direction d'une ville voisine, caressant déjà des projets de vengeance, peut-être en retrouvant son père et en le persuadant qu'elle a été droguée et manipulée par le cardinal Antonelli.
Voilà une suite des aventures de Pulchéria qui s'annonce prometteuse, mais qui hélas ne verra pas le jour, car à ce moment-là, le roman de Léo Taxil est tranché net comme par un couperet, et son déroulement normal est définitivement interrompu.
Pulchéria, sur son chemin, rencontre un jeune et beau cavalier qui, devinant une demoiselle en détresse, lui vient naturellement en aide. Le coeur cupide et orgueuilleux de Pulchéria s'éveille brusquement à l'amour, et oubliant sa fortune perdue et ses désirs de vengeance, elle monte derrière le beau cavalier, et va plutôt racheter ses pêchés dans un amour pur et dans une nouvelle vie d'épouse amoureuse. Et voilà comment on se débarrasse en quelques pages d'un personnage dont on n'a finalement plus besoin.
C'est en effet à ce moment-là de la narration que Léo Taxil est informé que le comte Girolamo Mastaï, neveu de Pie IX, porte plainte contre lui pour diffamation. L'affaire est sérieuse, car le comte est puissant, et il est soutenu et relayé par tous les journaux catholiques français. Léo Taxil ne risque pas seulement la prison, mais aussi une lourde amende qui peut le ruiner, lui et sa famille.
Dans les dernières lignes de son récit, la tension, le stress, sont palpables. Il se réfère à deux reprises, dans sa narration, au « procès qu'on veut nous faire ». Le récit initial laisse soudainement place à une sorte de dossier biographique à charge, qui se poursuivra d'ailleurs encore plus longuement dans le quatrième volume.
Il m'est difficile de m'exprimer sur cette gigantesque insertion qui cumule au total près de 300 pages sur la totalité de l'oeuvre, et qui prétend renseigner le lecteur sur les crimes politiques, religieux et sexuels de Pie IX, non plus dans le roman feuilleton, mais dans ce que fut la vie réelle du pape disparu deux ans plus tôt.
D'abord parce que les faits rapportés ici ne se trouvent dans aucune biographie officielle ou non-officielle de Pie IX, même si elles s'inspirent souvent de faits avérés, tout en les accentuant et en ajoutant des détails pour noircir encore la nature criminelle du pontificat de Pie IX. Rien n'atteste donc de la réalité objective des centaines de crimes rapportés dans ce dossier. Vraisemblablement rédigé dans l'urgence, sur un ton méthodique mais belliqueux, ce dossier ne semble avoir pour but que de démontrer que la réalité du pontificat de Pie IX est mille fois pire que ce que le romancier s'est permis d'imaginer. Cependant, aucune documentation, aucune preuve, aucun témoignage certifié ne viennent étaler ces allégations, même de nos jours.
L'autre raison pour laquelle je ne m'exprime pas sur cette dernière partie du troisième tome, c'est que le style, la rhétorique, le ton employé, le militantisme républicain farouche (incongru de la part de l'anarchiste Léo Taxil) m'amènent à penser qu'elle n'a pas été rédigée par l'auteur lui-même, mais plutôt par un collectif de personnes venues à sa rescousse, parmi lesquelles on peut compter à peu près avec certitude son frère Maurice Jogand, feuilletonniste socialiste militant, auteur de nombreux romans sous le pseudonyme de Marc Mario, et Maître Delattre, avocat de la défense au barreau de Paris, dont la plaidoirie reproduite dans le quatrième tome, partage un certain nombre d'accents avec quelques pages de ce pamphlet.
Tout cela fait que cette longue partie, parfois émaillée de brefs retours aux personnages du roman, n'a pas de véritables liens avec l'intrigue, et n'a été rédigée et publiée, à mon sens, que dans la perspective du procès intenté contre Léo Taxil par le comte Girolamo Mastai. Je reviendrai plus longuement dans ma critique du quatrième tome sur les détails et la tenue de ce procès qui eut lieu le 29 décembre 1881, mais ne trouva sa conclusion définitive que le 13 mai 1882 après nombre de renvois et d'appels.
Ce troisième tome des « Amours Secrètes de Pie IX » est donc beaucoup moins réussi que le précédent, en partie de par le désordre émotionnel suscité chez l'auteur par la menace juridique qui pesait sur lui; en partie aussi par une certaine confusion à gérer les différentes intrigues du roman, de plus en plus nombreuses et de plus en plus complexes, au point d'ailleurs qu'il m'aurait fallu écrire un texte deux fois plus long pour les résumer toutes. Certaines d'ailleurs ne mènent nulle part ou tournent court, Léo Taxil étant clairement dépassé par les développements tentaculaires de son roman.
Toutefois, il faut reconnaître qu'une fois encore, le romancier démontre son talent à imaginer des scènes délirantes, des rebondissements spectaculaires et variés, des passages absolument scandaleux et choquants, le tout baigné dans cette noirceur nihiliste qui est pour beaucoup dans le charme transgressif que son roman dégage, poussant la diffamation de toute vertu, de toute foi, de toute institution, jusqu'à une sorte de psychopathie hilare qui demeure encore très moderne.
Alors que l'on s'avance progressivement vers la fin du roman, « Les Amours Secrètes de Pie IX » apparait à chaque nouvelle page comme une monstruosité littéraire aussi incongrue et vénéneuse que génialement démente, et qui, sans le procès qui vint abréger sa publication, aurait probablement perduré le temps de deux ou trois tomes supplémentaires.
Les 3 autres tomes :
~ Tome 1 : https://www.mortefontaine.org/post/l%C3%A9o-taxil-les-amours-secr%C3%A8tes-de-pie-ix-tome-1-1881
~ Tome 2 : https://www.mortefontaine.org/post/léo-taxil-les-amours-secrètes-de-pie-ix-tome-1-1881
~ Tome 4 : à venir.
Ci-dessous, 37 gravures tirées de ce troisième tome, et colorisées à l'aide de l'application Palette :









































![LÉO TAXIL - « Les Amours Secrètes de Pie IX [Tome 3] » (1881)](https://static.wixstatic.com/media/f75923_31ba5e9b04b848cca37c9d04521cc5f6~mv2.jpg/v1/fill/w_250,h_250,fp_0.50_0.50,q_30,blur_30,enc_avif,quality_auto/f75923_31ba5e9b04b848cca37c9d04521cc5f6~mv2.webp)
![LÉO TAXIL - « Les Amours Secrètes de Pie IX [Tome 3] » (1881)](https://static.wixstatic.com/media/f75923_31ba5e9b04b848cca37c9d04521cc5f6~mv2.jpg/v1/fill/w_292,h_292,fp_0.50_0.50,q_90,enc_avif,quality_auto/f75923_31ba5e9b04b848cca37c9d04521cc5f6~mv2.webp)












![LÉO TAXIL - « Les Amours Secrètes de Pie IX [Tome 2 ] » (1881)](https://static.wixstatic.com/media/f75923_1c0651c616b840c2895d2777c4b2a1ad~mv2.jpg/v1/fill/w_250,h_250,fp_0.50_0.50,q_30,blur_30,enc_avif,quality_auto/f75923_1c0651c616b840c2895d2777c4b2a1ad~mv2.webp)
![LÉO TAXIL - « Les Amours Secrètes de Pie IX [Tome 2 ] » (1881)](https://static.wixstatic.com/media/f75923_1c0651c616b840c2895d2777c4b2a1ad~mv2.jpg/v1/fill/w_292,h_292,fp_0.50_0.50,q_90,enc_avif,quality_auto/f75923_1c0651c616b840c2895d2777c4b2a1ad~mv2.webp)


![KARL-HEINZ HELMS-LIESENHOFF - « Gretchen En Liberté » (1953) [Une Armée de Gretchen, Tome 3]](https://static.wixstatic.com/media/f75923_9344a43ce5b549bfa62458151a6b255b~mv2.jpg/v1/fill/w_250,h_250,fp_0.50_0.50,q_30,blur_30,enc_avif,quality_auto/f75923_9344a43ce5b549bfa62458151a6b255b~mv2.webp)
![KARL-HEINZ HELMS-LIESENHOFF - « Gretchen En Liberté » (1953) [Une Armée de Gretchen, Tome 3]](https://static.wixstatic.com/media/f75923_9344a43ce5b549bfa62458151a6b255b~mv2.jpg/v1/fill/w_292,h_292,fp_0.50_0.50,q_90,enc_avif,quality_auto/f75923_9344a43ce5b549bfa62458151a6b255b~mv2.webp)



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